Frédérique Bangué — Les Entretiens de Valpré

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Au croisement de l’entreprise et de la personne humaine

Frédérique Bangué

Après une carrière d’athlète internationale, Frédérique Bangué s’est reconvertie en collaborant en tant qu’animatrice ou chroniqueuse dans de grands médias tels que RMC, Canal + M6 ou France 4… Plus récemment, elle s’est lancée dans un projet qui lui tenait à cœur : la création d’un magazine familial gratuit sur le sport et plus précisément sur le rôle des parents dans les pratiques sportives de leurs enfants.

Son titre, Salto Mag, évoque parfaitement les prouesses qu’elle développe pour stabiliser le projet : fait du  hasard ou prémonition ?  Et pourtant, face aux risques majeurs qu’entraine la surexposition aux écrans des jeunes générations, le journal relève presque de l’utilité publique, surtout en cette période post-confinement…

Entretien avec une vice-championne du monde d’athlétisme, d’origine lyonnaise, qui n’a pas fini de courir.

Tout commence par une expérience très personnelle

Lorsque Frédérique Bangué aborde la présentation de son projet, elle précise immédiatement que c’est son rôle de maman qui a inspiré l’idée de ce magazine.

« Comme tout parent, je me posais des questions sur la meilleure manière d’aider ma fille à grandir…

et bien sûr, en tant qu’ancienne athlète, le sport est  devenu très vite central dans son éducation. Mais comment faire passer le message tout en respectant les envies et sans que cela ne devienne une obligation pour l’enfant ? Ma fille m’a donné plein d’idées, elle m’a surtout poussée à croire à ce projet un peu fou. Elle voit que je travaille dur mais que les résultats sont là. C’est exactement ce que l’on aborde dans le magazine où l’on parle d’effort, de dépassement de soi, de transmission… Je n’oublie jamais que tout est partie d’elle et que, du coup, je n’ai pas le droit de la décevoir. C’est un formidable moteur. »

Un parcours riche d’enseignements

Depuis sa création, Salto Mag a bien grandi. Mais au contraire de certains startuppers, Frédérique refuse encore de parler d’une success story, même si l’équipe a réussi à sortir et distribuer 300 000 ex  du journal sans investissement financier personnel. « C’est un beau projet et nous nous donnons du mal, mais je reste humble et prudente. Nous abordons l’aventure numéro par numéro … Tant qu’on n’a pas passé les 3 ans, ce n’est pas le moment de faire les malins ! » déclare t’elle avec raison.

Comme toute aventure entrepreneuriale, les choses ont commencé modestement et grâce à des rencontres déterminantes. Ce fut d’abord l’engagement d’un graphiste et de deux associés qui a permis de sortir un premier numéro à 5000 ex en 2018. Et puis des journalistes et rédacteurs web, trouvant le concept éditorial intéressant, ont décidé de collaborer, souvent gracieusement au départ. Cet élan de solidarité est une grande fierté mais surtout une agréable  surprise pour la fondatrice. « Ce que je trouve incroyable, c’est que des gens aient pu adhérer au projet juste à partir d’une idée ! ». La clé de cette adhésion réside certainement dans la maturité du projet qui a pris son temps avant la sortie du premier numéro « Durant un an, j’ai fait mille rencontres…  des entrepreneurs notamment dans le monde de l’édition,  du sport… déclare Frédérique. Je cherchais de l’argent, et je repartais souvent sans un sou mais avec de précieux conseils. Beaucoup de chefs d’entreprises m’ont donné de leur temps et sont devenus de véritables mentors. ». 

Ainsi, Stéphane Diagana est un supporter de la première heure et Caroline Goldman, psychologue pour enfants et adolescents, accepte rapidement d’écrire dans le magazine, collaboration qui se poursuit encore aujourd’hui. Comme beaucoup d’autres, ils constatent que le sport peut vraiment compenser des difficultés rencontrées par les enfants et aider les parents dans leur rôle d’éducateur. « En pratiquant un sport, on rencontre des gens, on fait du lien social, on apprend l’échec… et ce sont souvent les entraîneurs qui subissent les crises d’adolescence ! » Un bon paratonnerre, donc, pour des familles parfois un peu dépassées et fatiguées par une vie quotidienne pas toujours très facile à gérer… « Une activité sportive est un complément essentiel à l’éducation » martèle l’ancienne championne.

Couverture numéro prochain numéro Salto MagAu-delà du discours de conviction, on pourrait croire que le passé d’athlète, puis d’animatrice dans les grands médias, légitime naturellement le projet de Frédérique Bangué et facilite sa recherche de partenaires. Il n’en est rien. Elle a dû aussi faire face aux idées reçues et à nouveau faire ses preuves. « On met encore trop souvent les gens dans des cases et la mienne était celle d’une sportive de haut niveau… de laquelle je ne devais pas sortir » regrette t’elle. Heureusement un premier partenaire, le groupe AESIO (ex Adréa Mutuelle) a fait fi de cet à priori. Depuis d’autres ont suivi comme Sport 2000 qui distribue le magazine dans tous ses magasins en France.

Autre grand principe pour la jeune entrepreneuse : aller chercher les compétences plutôt que d’essayer de se débrouiller seule et donc de faire moins bien. La très bonne nouvelle, qu’elle qualifie d’immense chance, c’est l’arrivée de Fabrice Jouhaud, ancien rédacteur en chef du journal l’Équipe, qui pilotera et animera le groupe des rédacteurs   tous très engagés aujourd’hui dans l’aventure.

Seul regret pour Frédérique, c’est qu’il n’est pas possible, depuis le début de la crise sanitaire, de poursuivre la distribution du magazine en format papier. « Nous espérons recommencer en septembre… C’est très important pour nous parce que cela facilite le confort de lecture, le partage au sein de la famille. Certaines rubriques intéressent en effet les parents, d’autres les enfants, d’autres les deux… il faut que le journal circule dans la maison ! ».

Entre informations sportives incluant le sport-handicap, articles psycho, santé ou médecine douce, BD et jeux pour les plus jeunes… le contenu est effectivement riche et suscite l’intérêt au-delà de la sphère familiale, comme en atteste le courrier des lecteurs. « Le monde de l’éducation - que ce soit des professeurs, instituteurs ou entraineurs - nous lit également, se réjouit Frédérique, et ceci aux quatre coins de l’hexagone alors que nous pilotons tout depuis Annecy ! Notre magazine est très qualitatif grâce à la contribution de grandes signatures et je voudrais ici remercier et féliciter toutes mes équipes pour ce résultat dont nous pouvons être fiers collectivement. Nous nous battons également pour garantir la gratuité totale du journal, y compris les frais d’acheminement. Nous sommes convaincus que le message que nous portons doit pouvoir parvenir à tous les publics, y compris dans les familles aux contraintes budgétaires lourdes. Ce combat éthique constitue un effort financier majeur, ce d’autant que nous ne souhaitons travailler qu’avec des annonceurs en ligne avec nos valeurs santé-sport. »

Et maintenant ?

Malgré les difficultés actuelles, Frédérique poursuit l’aventure avec courage et détermination. « Nous recherchons des soutiens financiers et des entreprises partenaires qui adhèrent à l’idée de promouvoir le sport chez les jeunes.

Le confinement a souligné à quel point il est important d’aider les nouvelles générations - et leurs parents -

qui rencontrent de grandes difficultés à s’extraire de l’emprise des écrans. Le sport est un excellent adjuvant pour la santé mais aussi pour les valeurs éducatives qu’il transmet. La France n’était pas, culturellement, un pays favorisant les pratiques sportives, mais cela change peu à peu. Nous espérons une prise de conscience collective et tentons modestement d’y contribuer. Nous ne sommes pas donneurs de leçon, nous savons que l’exercice est difficile. Mais nous sommes convaincus que c’est un combat nécessaire pour redonner un cadre, préparer nos jeunes à un monde difficile où le goût de l’effort, l’engagement, le civisme seront tout simplement capitales. Il en va également de l’avenir du travail et de la vie professionnelle : partout où j’ai l’occasion d’intervenir en tant que conférencière, je m’aperçois combien les passerelles entre le sport  et le monde de l’entreprise sont nombreuses. Et nous devons également préparer de futurs collaborateurs à cette forme d’esprit d’équipe crucial pour l’économie. C’est pourquoi Salto Mag se veut être une boite à outils remplie de témoignages, idées, conseils à destination des familles pour les aider à y parvenir. »

Il faut au moins avoir été une fois vice championne du monde pour relever un tel défi… une belle illustration des vertus du sport, assurément !

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Co-fondatrice des « Petites Cantines », un réseau de restaurants solidaires de quartier, ouverts à tous, dont l’objectif est de développer les liens de proximité et de promouvoir l’alimentation durable.

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Athlète handisport, elle est détentrice de neuf médailles lors des Jeux paralympiques. Elle est élue en décembre 2018 présidente du Comité paralympique et sportif français.